RUHE | link

Les ruines de la citadelle s'étalent devant vous. C'est le symbole, enfin, un des nombreux symboles de son échec à ses yeux. Tu le sais bien, tu la connais par cœur après tout. Tu le vois quand tu la regardes observer les ruines autour de vous, les lèvres pincées et le regard lointain, les yeux humides, la main contre son torse distraitement, le poing serré. A quoi pense-t-elle ? C'est une question qui te taraude souvent, sans savoir que la même question l'angoisse chaque soir à ton sujet. Tu as beau la connaître sur le bout des doigts, ce qu'il se passe dans sa tête t'est inconnu. Pense-t-elle à son père, ses sujets ? Pense-t-elle à toi, aux prodiges ? Pense-t-elle à Hylia ? Finalement, elle soupire.

Bon. Je crois que c'était cette maison, là-bas. Faisons vite...

Vous étiez à la recherche de la maison d'un noble de la cour, toute proche des remparts du château. Il aurait été impliqué dans la restauration des niveaux inférieurs du château bien avant votre naissance à tous les deux. C'est ici que vous pourriez trouver des informations sur ce qu'il se trouve en dessous du château avant même d'y emmener une expédition, ce qui vous ferait gagner un temps et des ressources précieux. Elle pointe du doigt une bâtisse en ruines, et vous vous mettez en marche.

Malgré la centaine d'année qui se sont écoulées, vous vous souvenez finalement très bien de l'agitation dans la citadelle, pendant les beaux jours. De l'odeur des marchés aux cris des enfants en plein jeu. C'est ici qu'il a grandi, à quelques rues d'ici. Enfin... Rues... Peut-on encore parler de rues ? C'est toujours avec un pincement au coeur qu'il aborde la citadelle, celle qu'il a abordé il y a des mois, massacrant les gardiens corrompus pour arriver jusqu'à toi. Mais Link étant ce qu'il est, il ne montre que peu ses émotions, et même si tu es celle qui le connait le mieux, tu as souvent l'impression de ne rien savoir sur lui.

À ta remarque, néanmoins, il hoche la tête. Il n'y a pas de monstres ici, il n'y avait que les gardiens, mais privés de leur corruption puis détruit, ils ont laissé la citadelle plus vide que jamais. Une véritable ville fantôme.

Tu remarques néanmoins qu'il semble s'arrêter pour observer les ruines d'une petite maison, à quelques rues d'ici, avec intérêt. Intérêt qu'il semble perdre dès qu'il croise ton regard à nouveau, t'emboîtant le pas sans véritable entrain.

Fais attention où tu mets les pieds.

Ni toi, ni elle n'avez envie d'être ici. C'est un lourd fardeau que vous portez tous les deux, mais vous continuez à avancer, en silence. Vous continuez à avancer jusqu'à la petite bâtisse, et Zelda pousse un soupir que tu trouverais presque agacé.

Il n'y a plus rien ici... enfin, cherchons quand même.

Elle pose son regard sur toi et t'adresse un petit sourire amusé.

Fais attention où tu mets les pieds.

Il y a de l'écho dans cette citadelle, hein. Elle ricane un peu, avant de pousser la porte de bois dont il ne reste quasiment rien. Devant vous, le fantôme de ce qui était avant un salon et une cuisine se dressent. Tandis qu'elle se dirige vers les restes de meubles, espérant trouver quelque chose dans une commode, tu observes le sol à la recherche d'une quelconque trappe.

La façon dont tu répètes ses propres mots lui fait esquisser un léger sourire, sourire qui s'efface rapidement alors que vous vous mettez en quête de la moindre information. Bien qu'il soit grandement sceptique sur le fait de trouver quelque chose ici, il a parfaitement conscience de l'importance de cette mission. Et entre nous, il repousse autant que possible l'expédition dans les profondeurs. C'est sûrement son instinct, même s'il sait qu'il ne pourra pas éternellement te retenir à la surface.

Il observe le toit en ruine à un "étage" au dessus de vos têtes, menaçant de s'écrouler au moindre coup de vent. Malgré les bruits de bois qui travaille, tu te répètes inlassablement que si tout cela avait dû s'écraser, cela serait arrivé bien avant, mais tu restes vigilante.

Si tu cherches des documents, il y a peu de chance qu'ils aient survécu au temps et à l'humidité, non ?

Il se hasarde à demander, poussant du bout du pieds quelques planches entassées dans un coin de pièce.

Tu te dis qu'au pire, si ça vous tombe sur la tête, vos crânes seraient certainement plus solides que les pauvres planches de bois qui soutiennent à peine la bâtisse. Mais bon, tu as déjà suffisamment de migraines comme ça.

Pour être honnête... je n'ai aucune idée de ce que je cherche.

Elle passe sa main contre un four en pierre, retire la poussière et la terre qui s'y sont accumulées.

Link. J'aimerais qu'on parle.

Quand bien même tu sais que tu n'as rien fais de mal ces derniers temps, tu te crispes.

Il se tend alors que tu prononces ces mots et s'arrange pour te tourner le dos et observer avec un intérêt clairement exagéré le coin de la pièce principale. Il te fait même l'affront de s'accroupir pour farfouiller au milieu des planches et restes de meubles, faisant mine d'y chercher quelque chose.

Mh ?

Link ne serait pas Link s'il était facile à lire et à aborder, pas vrai Zelda ? Évidemment qu'il ne sait jamais où se mettre ni comment se placer quand tu annonces que tu veux lui parler, toujours persuadé d'avoir fait une bêtise.

Tu ne le vois pas puisque tu es dos à elle, mais ton feint intérêt pour le mobilier en ruines autour de vous et ta subtile tentative d'éviter son regard la fait sourire, et ses joues rosir. Elle adore chaque petite partie de ta personnalité, sauf peut-être ta fâcheuse habitude à foncer dans le tas et à réfléchir aux conséquences plus tard, ou le désintérêt évident que tu as pour ta propre santé. Mais tout ça, elle ne te le dira pas.

Est-ce que c'était réellement un coup du sort, lorsque tu as secouru ce Zora ?

Tu sais très bien de quoi elle parle.

La lame purificatrice... n'est-elle pas censée être en stase maintenant que le Fléau a été vaincu ?

Un silence de plomb s'installe entre vous.

Le silence s'installe et s'étire et s'étire encore. Tu ne sais pas quoi faire, face à son silence, et tu t'apprête à baisser les bras quand finalement il se relève et hausse vaguement les épaules, ne te faisant pas pour autant face.

Tu n'as qu'à lui demander.

Hé bien ! Voilà qu'il s'essaye à l'insolence, le prodige hylien, maintenant ? Tu ne sais pas si tu dois être agacée ou inquiète de son inquiétude et de sa fatigue apparente, celle qui semble peser sur ses épaules. Tu observes la lame dans son dos, posée dans son fourreau comme si elle te narguait.

Vous connaissez tous les deux la réponse.

Tu sens son indignation et son regard sur ta nuque, plus brûlant que jamais, alors qu'elle ouvre la bouche pour dire quelque chose mais qu'aucun son ne sort.

Comment oses-tu.. Link !

Elle se rapproche d'un pas, agitée.

Qu'est-ce qui te prend ?

C'est vrai que c'est bien la première fois que tu t'essaies à l'insolence de la sorte, et encore plus alors que vous êtes, contre ton gré, en train d'aborder un sujet aussi sérieux. De toute évidence, tu es stressé, mais il s'avère qu'elle l'est aussi.

Tu t'approches de lui et tu le sens se crisper, tu sens la tension dans les muscles de sa nuque et de son dos, et lorsqu'il fait volte face pour te regarder, il plonge ses yeux bleus dans les tiens. Il s'apprête à dire quelque chose, mais aucun son ne franchit la barrière de ses lèvres. Il semble prendre sur lui comme il le fait tous les jours. Le silence est bientôt suivi d'un soupir fatigué alors qu'il repousse ses cheveux en arrière.

Sous tes pieds.

Il tend l'index vers tes chaussures. Il y a une trappe.